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  • Éditions Contredanse Nouvelles de danse

    André Bernard. Cours 1 

    1ersemestre. New-York University, 29/9/1980

    André Bernard (1924-2003), danseur, comédien, homme de radio, était un professeur réputé d’Ideokinesis. Durant 10 ans, il a étudié avec Barbara Clark, elle-même élève de Mabel Todd. Son enseignement a eu un profond impact sur des artistes de la scène, surtout les danseurs, non seulement à New York mais aussi à travers le monde. Le texte qui suit est une retranscription (partielle) d’un de ses cours d’introduction à l’ Ideokinesis.
    La méthode

    Le travail que nous allons faire n’est pas facile à circonscrire parce qu’il a une influence globale sur l’organisme, physiologique et psychologique. Mais si nous voulions y chercher un objectif immédiat, nous pourrions dire qu’il s’agit d’une rééducation neuro-musculaire. Ce qui signifie que nous allons essayer de changer les schémas musculaires. Néanmoins je vous encourage vivement à ne pas vous limiter à cette seule définition lorsque vous ferez le travail car beaucoup d’autres choses peuvent survenir. La méthode consiste à utiliser des images mentales. D’où le nom ideo-kinesis, qui vient de deux mots grecs: ideosignifiant idée/image et kinesissignifiant mouvement.  Ce que nous disons est donc que l’idée – ou l’image – est le facilitateur du mouvement ou plus spécifiquement du schéma musculaire.

    Dans cette technique, nous utiliserons non seulement les images mais aussi les pensées, les concepts, les intentions et les désirs. Car une image est plus que simplement une image. Chaque image a sa vie propre. Et ma mission est de créer cette vie et vous aider à la créer.

    Maintenant, pour que vous compreniez pourquoi nous utilisons cette méthode, il est important de définir ce qu’est le mouvement. Ceci évitera à certaines personnes de penser que nous sommes des fantaisistes et que nous faisons uniquement cela pour nous amuser ; même si effectivement nous nous amuserons ˗ ça ne doit pas être une corvée, bien sûr…

    Le mouvement volontaire

    Une des manières de définir le mouvement volontaire, consiste à dire qu’il s’agit d’un événement neuro-skeleto-musculaire. Ça signifie que pour qu’un mouvement volontaire ait lieu ? il est nécessaire que tous les systèmes mentionnés (à savoir les systèmes nerveux, musculaire et squelettique) soient impliqués.  Chacun de ces systèmes a son propre rôle à jouer dans l’événement. Le système nerveux est le messager, le système musculaire le moteur (ou le cheval de trait) et le système squelettique ce qui est bougé. Ce dernier fait donc la meilleure affaire, il suit simplement le trajet.

    Allons maintenant au cœur de cette équation. La question cruciale est celle-ci : si le système nerveux est le messager, et si le message traverse le système nerveux et le système musculaire fait son travail, qu’est-ce qui met en œuvre le processus ? Que transmet le message au système nerveux ? C’est spécialement le désir ou l’intention de bouger qui met en œuvre tout le processus car c’est bien du  mouvement volontaire dont nous parlons. Vous pouvez étudier l’anatomie ou la physiologie autant que vous voulez, vous ne devez jamais perdre ce principe de vue. Les gens pratiquant les arts martiaux savent bien cela : ils s’entraînent en termes de mouvement et non en termes de muscles. Le corps ne connaît pas les muscles, le corps connaît le mouvement. C’est votre intention de bouger qui fait en sorte que le message dans votre système nerveux aille vers vos muscles. C’est lui qui les fait se contracter ou autre chose, pour que le mouvement puisse avoir lieu.

    Ensuite, le système nerveux n’est pas seulement un messager, c’est aussi un organisateur. Il organise le schéma musculaire nécessaire au mouvement que vous désirez effectuer. Et il le fait à un niveau sous-cortical – ce qui signifie simplement en-dessous du niveau de la conscience. Donc, ce qui importe dans l’étude du mouvement, qu’il soit de la danse, du sport, un art martial ou peu importe, c’est ceci : quel est le mouvement ? Parce que le schéma musculaire n’est pas sous notre contrôle volontaire.

    Il se peut, quelquefois, que nous ayons l’impression d’avoir un contrôle volontaire sur nos muscles ; par exemple, lorsque j’écarte le bras de mon corps – ce mouvement se nomme abductionen kinésiologie.  J’ai le désir, la capacité de désirer écarter mon bras du corps et je peux focaliser mon attention sur ce mouvement ; et quand je le fais, le deltoïde se contracte en réponse à cela et va aider mon bras à s’écarter du corps. Ceci est ce sur quoi nous avons un contrôle volontaire. Ce sur quoi nous n’avons pas de contrôle est de dire à notre deltoïde de se contracter pour que le bras se soulève ; c’est le chemin inverse.  Ca peut sembler une question oiseuse, mais ça ne l’est pas dès lors que vous comprenez les choses plus en profondeur parce que les muscles n’agissent pas isolément ; ils agissent en groupe et chaque groupe interagit avec un autre. Or nos connaissances du fonctionnement des muscles restent très sommaires et se contredisent parfois entre elles. Nous nous occuperons donc essentiellement de la représentation du mouvement.

    Décortiquons maintenant les composantes du mouvement volontaire, celui donc sur lequel vous avez un contrôle. Voyons de quoi il est fait. Les cinq composantes volontaires du mouvement sont son début, sa fin, sa direction, sa force et sa vitesse. Elles sont très importantes.

    Le schéma musculaire, lui, je le répète, est involontaire ; il est une fonction du système nerveux. Et il doit réellement le rester ; je veux dire que vous ne devriez pas interférer avec le mouvement en pensant que vous êtes capable de contrôler le schéma musculaire. Par exemple, si je fais un pas, on estime que 119 muscles sont impliqués dans ce simple mouvement d’avancer son pied. Il vous est bien entendu impossible de penser assez vite pour organiser ce schéma, cette organisation doit se faire à un niveau sous-cortical.

    Les images

    J’aimerais maintenant introduire la notion d’image. L’image est le signal dans le système nerveux qui va influencer le schéma musculaire. Or rappelons-nous que c’est l’intension ˗ le désir ou la pensée ˗ qui met en œuvre la réponse neuro-musculaire. Nous allons donc utiliser des images pour accentuer ce principe et modifier le schéma musculaire. Vous vous demanderez peut-être : si nous ne pensons pas aux muscles, à quoi donc allons-nous penser ? Pour une grande part c’est à la structure et à ce qui arrive à  cette structure. C’est-à-dire au fonctionnement du mouvement proprement dit.

    Les images que nous allons utiliser peuvent être divisées en deux catégories : 1) Les images abstraites ; grâce auxquelles vous allez vous imaginer quelque chose que vous n’êtes pas. 2) Les images structurelles ; grâce auxquelles vous visualiserez les os du corps, impliqués dans différentes relations entre eux ou avec l’environnement.

    Le schéma postural

    Ce schéma de relations a été expliqué par Lulu Sweigard dans une définition qu’elle nomme le schéma postural : « L’alignement constant et continu des parties de la structure par rapport à son axe central ». L’axe central est simplement la ligne qui traverse le centre du corps.

    Le schéma postural est donc la relation constante et continue des parties de la structure avec son axe central, selon Sweigard. Mais d’où vient-il chez Todd ?

    Il provient de l’idée que Todd a eue dans les années 1930, de comparer poétiquement l’organisation d’un corps individuel (sa structure, ses os) au cosmos. Comme il est plus facile de penser en termes de microcosme que de macrocosme, intéressons-nous ici au microcosme d’un élément, d’une substance  comme par exemple celle du banc sur lequel vous êtes assis. Si vous l’observez à la lueur d’une de ses plus petites composantes, d’une de ses plus petites unités de matière, vous arrivez à la molécule. On peut aller encore bien au-delà de la molécule. Mais restons à cette échelle. Chaque matériau peut être ramené à un niveau moléculaire. Ces molécules sont arrangées de telle sorte qu’il y a de l’espace entre elles. En outre, ces molécules sont en mouvement, elles vibrent. Ceci est vrai pour n’importe quelle substance, même les plus dures – pierre, métal, ou autre, même si dans les substances solides, l’espace entre les molécules est assez réduit, et les vibrations ne sont pas si intenses. A un niveau liquide, l’espace est plus lâche et les vibrations s’amplifient ; à l’état gazeux, ceci augmente encore.

    L’important ici est de comprendre qu’il n’y a rien de complètement solide ou fixe ; tout est toujours en mouvement et il y a toujours de l’espace quelque part.

    L’organisation moléculaire d’une substance donnée est toujours constante et stable (à moins qu’elle change en quelque chose d’autre), de telle sorte que vous reconnaissez cette substance par cette organisation. Une éponge a une organisation moléculaire de telle sorte que nous la voyons bien comme une éponge et pas comme quelque chose d’autre.

    C’est ce à quoi Todd comparait notre organisation structurelle. Une très belle comparaison. Elle soulignait aussi que cette organisation qui est la nôtre est quelque chose d’identifiable. C’est ainsi que nous reconnaissons nos proches, par cette configuration globale. Que nous le réalisions ou pas lorsqu’on pense à notre femme, à nos frères, sœurs, parents… c’est de cette configuration que l’on se souvient.  Un critique de danse du début du XXe siècle prétendait qu’il pouvait voir sur scène n’importe quel danseur dont il avait critiqué le travail et, peu importe la distance où il se trouvait dans la salle, il était capable de reconnaître de qui il s’agissait simplement en le regardant marcher ou se tenir debout. C’est de ça qu’il s’agit quand nous parlons du schéma postural.

    Le schéma postural idéal et l’équilibre mécanique

    Penchons-nous maintenant sur ce qu’est le schéma postural idéal.Celui-ci doit en principe suivre les lois de l’équilibre mécanique. Gardons ici à l’esprit que le corps humain est instable par la nature même de sa structure. Le corps humain ne peut être stable en position debout, il peut être équilibré mais pas stable. En d’autres termes, il a besoin d’un apport d’énergie pour maintenir sa position debout. Vous devez donc soit utiliser le travail de vos muscles soit demander à un ami de vous soutenir, mais la structure ne va pas rester en équilibre sans aide extérieure, ou intérieure dans le cas de votre propre énergie.

    La loi de l’équilibre mécanique nous dit que le schéma postural idéal est celui dans lequel les différentes parties de la structure sont aussi proches du centre et le centre de gravité aussi bas que la structure le permet. Ceci ne veut pas dire que vous deviez distordre votre structure pour rapprocher les parties du centre. Car le schéma postural idéal est ˗ dans le cadre de cette définition ˗ quelque chose d’idiosyncratique. C’est-à-dire qu’il est individuel et que chacun ne doit pas se fondre dans le même schéma postural idéal. Ce schéma est le produit de relations.

    Donc une grande part de ce travail sur les images consistera à visualiser les parties de la structure se rapprocher du centre. C’est un peu simplifié, mais au moins cela donne à ceux pour qui le travail semble un peu étrange au départ, quelque chose à quoi se raccrocher, du moins jusqu’à ce que vous en ayez une meilleure compréhension par l’expérience.

    L’utilisation des images

    Les images ne sont pas seulement des images, elles ont une vie propre et une partie de ma tâche consistera à vous assister dans le processus visant à donner vie à ces images. Voici quatre principes concernant l’utilisation des images.

    1° Les images doivent être en train de s’accomplir. Elles ne sont pas encore faites. Cela signifie que vous êtes impliqués dans le processus et non dans le produit fini. Par exemple, nous allons nous imaginer être un ensemble de vêtements. L’image à visualiser sera celle de vêtements reposantsur le sol et non pas déposés sur le sol, comme on a tendance à le faire.  2° Le lieu est spécifique. Il n’est pas juste un lieu habituel. 3° L’image va toujours quelque part, elle est toujours en mouvement. Sa direction est donc importante. 4° Vous êtes un observateur. Il n’y a pas besoin de produire un mouvement volontaire pour faciliter l’image, ce qui est pourtant très tentant.

    (…)

    Deux remarques encore à propos des images. Elles ne doivent pas être prises littéralement ni comme des absolus. L’image est un outil. Et nous l’utiliserons comme telle et ne la laisserons pas devenir quelque chose dont nous sommes esclaves

    Enfin, il est important de ne pas évaluer le processus lorsque vous êtes occupés. Une fois qu’il est terminé évaluez-le autant que vous voulez. Faites une thèse dessus ou tout ce que vous voulez mais pas pendant le processus. (…). Car le problème si vous vous mettez à évaluer le processus, est que vous chargez le système nerveux d’informations externes. Et la seule chose que vous réussirez alors est de tout embrouiller.  Le message que vous voulez en définitive lui faire passer par l’utilisation d’une image devient flou et ne lui parvient pas. Donc il rend le processus moins efficace. Il embrouille l’objectif et encombre le système nerveux de débris inutiles.

    La même chose si vous vous évaluez en regard de résultats attendus et précis, vous demandant si vous faites bien ou mal ; ou si vous vous efforcez de ressentir quelque chose. Ça peut aussi interférer avec le processus. Ceci ne veut pas dire que vous ne devez rien ressentir. Accompagnez votre expérience. Simplement. Laissez l’expérience être ce qu’elle est. Vous savez que dès que l’on travaille au niveau mental, on limite les possibilités de ce qui va se passer. Jusqu’au moment où vous laissez vraiment le processus agir au niveau du subconscient, à un niveau sous-cortical.

    Le repos constructif

    J’ai besoin d’un volontaire qui va s’étendre au sol. Chacun va aussi choisir un partenaire. Nous allons placer un petit tapis en mousse en dessous de la tête dans le but d’aligner la colonne cervicale. Les genoux vont se plier pour former un angle de 90 degrés à l’articulation. Nous plaçons un support sous la pointe des pieds pour aider à relâcher les muscles arrière de la jambe et plus particulièrement le tendon du jarret. Maintenant je lace un lien autour des jambes pour les maintenir au cas où elles auraient tendance à s’écarter. Beaucoup d’entre nous avons ce que j’appelle un schéma de rotation en dehors, ce qui signifie que les muscles qui tournent les jambes vers l’extérieur sont constamment hyper tendus. Quelquefois il s’agit d’un schéma hérité d’un entraînement de danse, mais parfois certaines personnes le développent simplement en grandissant. Dans ce cas, il est extrêmement difficile de rester couché dans cette position avec les jambes parallèles – ce que nous recherchons – à moins de fournir un effort musculaire  pour contrecarrer les muscles hypertendus qui ont tendance à tourner vers l’extérieur. Nous ne voulons pas compliquer davantage ce schéma de rotation extérieure par un autre schéma musculaire en vous forçant à ramener chaque fois vos deux jambes parallèles. C’est pourquoi nous plaçons ce lien qui supporte les jambes et évite de faire le travail que vous auriez à faire avec les autres muscles.

    Cette position permet de travailler l’alignement de l’articulation ilio-fémorale, à savoir l’articulation où la jambe rejoint le bassin, l’articulation de la hanche. Nous voulons que les articulations de la hanche, du genou et de la cuisse soient dans un plan ou plutôt nous voulons que ces articulations soient dans une position telle que si nous faisions passer un plan par le centre de l’une de ces articulations, il passerait par le centre de ces trois articulations.

    Donc, à ce moment, notre objectif est de maintenir ces trois articulations alignées les unes par rapport aux autres. L’importance de ceci n’est pas tant dans la position assise mais surtout dans la position debout où vous avez un poids important qui passe par ces articulations ; ce poids a besoin de circuler à travers les articulations autant que possible par leur centre. Sinon, il se crée une tension dans les articulations provenant d’un côté ou de l’autre, et les ligaments sont mis sous pression, les exposant à un stress qui peut entraîner des problèmes par la suite. C’est pour cela qu’au début je place les jambes parallèles et les maintiens à l’aide d’un lien. Vous pourrez varier la position dans votre propre pratique si vous le souhaitez.

    Concernant vos bras, vous pouvez simplement les placer par-dessus sur la cage thoracique. Si c’est inconfortable, vous pouvez adopter la position où les mains reposent simplement sur les côtes, avec les coudes au sol et les bras reposant également sur le sol. Durant le cours nous travaillerons avec les bras dans différentes positions – sur le côté, au dessus de la tête. Mais dans le repos constructif basique, la position est celle-ci. Cette position nous aidera aussi à développer la conscience kinesthésique de la ceinture scapulaire ˗ située en haut du sternum ˗ que peu de personnes ont naturellement.

    Nous sommes des vêtements

    Donc, maintenant que vous êtes dans cette position, restez simplement comme ça et ne faites plus aucun mouvement volontaire. Sauf si vous ne vous sentez pas à l’aise et désirez adapter votre confort. Mais ne changez pas pour un meilleur alignement.

    La première chose que vous allez imaginer est que vous êtes un ensemble de vêtements, peu importe lesquels, ceux que vous choisissez. L’important est qu’ils vous plaisent et que vous voudriez les porter ou les voir porter. Beaucoup de danseurs aiment porter des collants, certains d’entre vous aimeraient utiliser un jeans pour la partie des jambes, ou un autre pantalon, certaines personnes aiment porter un smoking ! Vous pouvez vous habiller comme vous le souhaitez ici, dans ce voyage imaginaire. Le haut peut aussi être ce que vous souhaitez : manteau, veste, ce que vous voulez. Plus tard quand vous serez plus habitués aux images, vous pourrez affiner le style, la forme, la couleur, le tissu, la texture – vous pouvez même déjà le faire si vous voulez. Mais l’important est de choisir quelque chose qui vous donne envie de vous y impliquer. La première chose à faire avec cet ensemble est de penser qu’il est léger et vide. Et qu’il repose sur le sol, comme le feraient des vêtements vides.

    L’aide par le toucher

    Introduisons maintenant l’aide par le toucher. La première aide visera la partie inférieure du corps. Le pantalon doit être visualisé comme pendantsur un cintre. Il est soutenu par le haut – comme si une barre ou un cintre descendait du plafond et le soutenait. La direction est donc vers le haut. Et vous allez donner une aide en plaçant vos doigts en dessous des genoux de votre partenaire, où le cintre est supposé se trouver, et vous allez tirer très doucement. Vous maintenez cette traction ferme et constante. Pendant ce temps votre partenaire, lui,  imagine le pantalon pendre sur le cintre et l’avant du pantalon se plier et se coller contre l’arrière du pantalon, comme le ferait un pantalon vide. Faisons donc simplement cela pour l’instant pendant que notre partenaire visualise l’image.

    Rappelez-vous que lorsque vous utilisez cette image, vous visualisez vos jambes comme un pantalon, et votre corps entier comme des vêtements ; ce ne sont pas véritablement vos jambes qui pendent sur le cintre, le cintre imaginaire, mais c’est le pantalon que vous imaginez. Et le pantalon est souple, et il pend passivement et le devant est collé contre l’arrière.

    L’aide suivante visera le pliage, le collage de la partie avant sur la partie arrière du pantalon. Si donc mes jambes étaient un pantalon et étaient placées sur un cintre, l’avant se collerait à l’arrière. Il suivrait les plis sur le côté, les coutures… L’aide pour cela consistera à placer votre main sous la cuisse de votre partenaire et presser doucement, pas une forte pression mais une toute petite, juste pour donner la direction. Descendez ensuite le long de la jambe et faites la même chose – la partie inférieure du pantalon se colle à l’arrière. Toujours un matériau souple et pliable.

    Maintenant nous remontons vers le tronc. Ici nous allons simplement toucher légèrement le haut de la poitrine.  La partie supérieure de la poitrine peut être une zone clé. Si vous parvenez à sentir la partie supérieure de la poitrine comme un blouson ou une veste vide, reposant sur le sol, ça peut être la clé qui vous ouvrira à la compréhension d’autres images. Pour l’instant, je dépose juste le poids de ma main ici, sans forcer.

    L’aide par le toucher est juste une manière de renforcer une image ; ce n’est pas une manipulation.

    Après avoir touché le haut du sternum, vous pouvez redescendre le long des autres parties de la cage thoracique – donnez simplement l’idée que tout cela repose sur le sol et que vous regardez cela se passer sans aucun effort volontaire pour faire en sorte que ça se passe.

    Ne négligeons pas les bras. Ils sont des manches. Nous touchons le haut et le dessous des bras, en pressant, comme nous le faisions pour les jambes, très doucement. Le partenaire perçoit le sens de l’image, la ligne de direction et où elle se situe.

    Des vêtements chiffonnés

    Imaginons maintenant les vêtements sous un autre aspect. Les vêtements sont complètement chiffonnés. Aujourd’hui nous allons nous concentrer sur les plis horizontaux, à l’arrière des vêtements. Ils recouvrent à la fois l’arrière de la chemise et du pantalon, jusqu’aux talons. Nous allons observer les plis qui vont s’adoucir, s’aplanir vers le bas. Notre direction est donc vers le bas. Une fois de plus nous nous intéressons au processus qui adoucit les plis, et pas au vêtement défroissé. Je ne m’intéresse pas au résultat, mais au défroissage.

    Pour cela, l’aide (prenez les bras de votre partenaire et placez-les comme je l’ai décrit plus haut sur la cage thoracique s’ils n’y sont pas déjà) consiste à lisser depuis le niveau des épaules vers le bas – je ne vais pas complètement sous le dos, je vais simplement aussi loin que je peux y aller facilement – jusqu’aux chevilles. Vous faites cela deux fois pour donner à votre partenaire le sens de la direction et de l’espace. Lui observe les plis en train d’être défroissés. En général deux ou trois fois sont suffisantes pour communiquer le  message au système nerveux. Ensuite il se l’approprie.

    Maintenant nous allons envisager un autre ensemble de plis. Peu importe comment vous vous représentez le tronc de votre corps, avec un blouson ou veste… En dessous, il y a une chemise ou un pull. La chemise en soi ne nous intéresse pas vraiment maintenant mais plutôt le col qui dépasse de la veste et recouvre en gros la longueur de votre cou. Ce col est potentiellement plus long qu’un col ordinaire, c’est un col roulé, et il est tellement froissé qu’il est tout ratatiné en dessous de la veste et nous allons le regarder se défroisser en dehors de la veste et jusqu’à la base de la tête. Voici en quoi consiste l’aide ici : nous monterons pour ensuite redescendre, nous monterons depuis le niveau des épaules ou un peu plus haut jusqu’à la base de la tête de notre partenaire. Et après avoir fait cela deux ou trois fois, vous prenez ensuite la tête de votre partenaire entre vos main et vous la soutenez en gardant le visage à l’horizontale. Et vous tirez doucement. Pendant ce temps, votre partenaire imagine les plis qui s’étirent et s’adoucissent.

    (…)

    Avant d’inverser les rôles, nous allons faire une dernière chose. Nous allons cette fois envisager la tête comme une image abstraite ; disons une balle ou mieux, un ballon. Pour cela, arrondissez vos mains autour des oreilles de votre partenaire, et votre partenaire va imaginer que sa tête est une balle, ou un ballon, et il va regarder ce ballon se vider. Continuez à le vider. Continuez à l’observer se vider. Ensuite vous allez imaginer ce ballon ou cette balle croître, avec l’expansion maximale entre ce qui serait les oreilles si l’image était anatomique. Le ballon est probablement la chose la plus facile à imaginer s’agrandir. Il s’étend dans toutes les directions mais plus particulièrement entre ce qui serait les oreilles.

    Maintenant, doucement retirez vos mains. Vous pouvez retirer les liens des jambes de votre partenaire. Ceux-ci vont replacer leurs bras le long du corps et rouler sur le côté de leur choix et se relever. Ceci est important. C’est une bonne mécanique corporelle que de vous tourner sur un côté ou l’autre avant de vous lever. Se relever immédiatement fragilise le dos, vous pourriez vous blesser, spécialement si vous n’êtes pas échauffé… Et puis se relever brutalement alors que tout le système s’est ralenti, va stresser inutilement votre corps, particulièrement le système cardiovasculaire. Ce qui n’est pas souhaitable.

    [i]La transcription du cours est due à Jane Refshauge et date de l’époque où A. Bernard enseignait l’Ideokinesis dans le département de danse de la School for Education, Health, Nursing and Arts Professions à la New York University. Ce texte est paru en anglais dans Writings on dance#22, Summer 2003/04, numéro d’hommage à André Bernard. La traduction et l’adaptation pour NDDsont de Cathy De Plée. Pour la version complète du cours voir notre site Internet

    La transcription du cours est due à Jane Refshauge et date de l’époque où A. Bernard enseignait l’Ideokinesis dans le département de danse de la School for Education, Health, Nursing and Arts Professions à la New York University. Ce texte est paru en anglais dans Writings on dance#22, Summer 2003/04, numéro d’hommage à André Bernard. La traduction et l’adaptation pour NDD sont de Cathy De Plée.

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